Les fours et le transbordeur Hashiba sur la rivière Sumida-gawa, c. 1857
« Les fours et le transbordeur Hashiba sur la rivière Sumida-gawa » (Sumidagawa hashiba no watashi kawaragama) est une oeuvre tirée de la série des “Cents vues d’Edo”. Cette série d’estampe est majeure dans l’œuvre très abondante du peintre Hiroshige.
Malgré le titre de l’œuvre, réalisée entre 1856 et 1858, il y a en réalité 119 estampes qui toutes utilisent la technique de la xylographie (gravure sur bois). L’artiste cherche à refléter les changements intervenus dans la capitale nippone au cours des dernières années, quand le progrès et la modernité progressent rapidement et détruisent les coutumes et les traditions du Japon. Les oeuvres de la série sont groupées selon les saisons de l’année comme l’indique : 42 estampes pour le printemps, 30 pour l’été, 26 pour l’automne et 20 pour l’hiver.
Dans cette oeuvre, le transbordeur Hashiba de la planche 35 traverse la Sumida-gawa, tandis que le premier plan dans le coin inférieur gauche est occupé par le four d’une tuilerie d’azulejo d’où émerge une colonne de fumée s’élevant au ciel dans une gradation de couleur allant du gris foncé au presque blanc. Sur l’eau se balancent quelques mouettes de l’espèce miyakodori (oiseau de la capitale). À l’arrière-plan se trouve la forêt du sanctuaire de Suijin et tout au fond à gauche, la silhouette du mont Tsukuba. Les bandes bleu et jaune dans le ciel paraissent uniquement sur le premier tirage. Elles ne sont pas indiquées sur la planche d’impression, mais correspondent à la technique atenashi bokashi. Les oiseaux gris et blanc sur le fleuve forment une allusion à la littérature ancienne (les Contes d’Ise), qui narre qu’un voyageur de Kyoto composa un poème en ce lieu en remarquant ces oiseaux inconnus. Pour Smith, la fumée (qui cache le torii du sanctuaire de Suijin) a ainsi un sens poétique, devenant le symbole de l’évanescence de la vie et de la solitude du voyageur.